La Dépêche du Midi du 13 02 96
CONSOMMATION
Carburants
L’huile végétale rend le
Diester vert de jalousie !
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Moyennant un mélange avec le gazole n’excédent pas 50%, tous les
véhicules lot-et-garonnais pourront peut-être consommer de l’HVB (Photos «La Dépêche », C.
B.)
Si l'Etat le lui permet, Alain Juste, ancien président des Verts 47, commercialisera bientôt un carburant végétal beaucoup moins cher (3 F/L) et polluant que le Diester.
Deux fois moins cher que le Diester
De vraies vertus écologiques
En attendant l'homologation de l'Etat
Alain Juste va créer son usine de production
A l'heure où le gouvernement s'emploie à, promouvoir le Diester et ses prétendues vertus écologiques, les Verts 47 et précisément, leur ancien président, Alain Juste, confient à qui veut l'entendre, que les ministres se sont trompés de filière.
De leur avis, non seulement
la contribution de ce carburant «vert» à la protection de l'environnement est,
sinon contestable, en tout cas très partielle, mais encore, son coût à la pompe
devrait, une fois les promotions épuisées, excéder celui du super. Et Alain Juste d'affirmer « être en possession d'un carburant végétal avec lequel le
Diester ne peut rivaliser et sur lequel le gouvernement aurait mieux fait de
miser ».
Entre les deux, en effet, la
comparaison est accablante pour le second. Ecoutons Alain Juste, propriétaire
d'un véhicule nourri depuis un an à l'huile végétale brute (HVB). " Le Diester est le nom commercial de l'ester obtenu à
partir d'huile et d'alcool en présence de soude. Cette huile végétale diffère
de la notre car elle est pressée à chaud ce qui induit de substantiels coûts de
fabrication et génère des gommes, inutiles à la carburation (et qui font défaut
à la valeur alimentaire du tourteau obtenu). Cette estérification s'accompagne
de 13 manipulations dont le cou^t de production est estimé à 6 F par litre de
Diester pour une réduction très modique des émanations lors de la carburation
dans les moteurs diesel ...
Prenons maintenant
l'HVB poursuit-il. Les graisses de colza ou de tournesol sont pressées à froid,
puis on décante et on filtre l'huile recueillie. Le processus de fabrication s'arrête là. Du coup, le litre d'HVB
peut être commercialisé à 3,5 F environ."
Quant à ses vertus
écologiques, elles sont sans commune mesure avec celles du Diester. A la
combustion, l'huile dont on peut se servir, le cas échéant, pour la salade, ne produit
pas de dioxyde de soufre (responsable des pluies acides) ni de CO2,
puisqu'il disparaît grâce à la photosynthèse.
Quant au dioxyde d'azote légèrement plus élevé que pour le diesel, il
diminuera considérablement dès lors que les véhicules diesel seront tous
équipés de pots catalytiques. Et ce
n'est là que la partie visible de l'iceberg des avantages écologiques de
l'HVB. Issue de végétaux oléagineux ne
nécessitant guère d' intrants chimiques pour leur production, inoffensive pour
la couche d'ozone, la fabrication de l'huile s'inscrit dans une réflexion
globale sur la lutte contre la pollution, s'agissant enfin de la consommation
des automobiles fonctionnant à l'HBV, elle est identique à celle des diesel,
tandis que la longévité des moteurs n'est pas davantage altérée par ce
singulier carburant », affirme encore ex-président des Verts 47.
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Alain JUSTE circule, depuis un an, grâce à l'huile végétale brute
En attendant
l'homologation de l'Etat
Pourquoi, alors, le
gouvernent n'a-t-il pas choisi de promouvoir cette énergie miraculeuse ?
Sans hésitation, Alain Juste
et Alain Bédouret invoquent l'influence des lobbies pétrolier et betteravier, ce
dernier écoulant l'essentiel de son éthanol dans le Diester. « Choisir l'HBV, c'est, dans une certaine mesure, condamner
leur production d'alcool », notent-ils en croisant les
doigts. Car dans quelques jours, la direction
nationale des hydrocarbures, placée sous l'égide du ministère de l'Industrie,
examinera leur dossier de demande d'homologation et d'autorisation de
commercialiser leur huile végétale brute.
S'il obtenait cette
autorisation, Alain Juste devrait, dans les mois à venir, inonder le
département avec sa mirifique HBV. A raison d'un mélange avec le gazole ne
devant pas excéder 50 %, tous les
propriétaires de véhicules diesel pourront, en effet, sans avoir recours à de
quelconques aménagements, garni leurs réservoir d'huile végétale, tandis qu'un
petit investissement de 1.500 F à 2.000 F sera nécessaire pour circuler
exclusivement avec l'HBV. De même, en
changeant le brûleur de leu chaudière à mazout, les particuliers pourront aussi
se chauffer grâce à ce combustible peu onéreux. C'est dire les enjeux à la fois financier et écologique, que
suppose la commercialisation à grande échelle de cette huile qui ne manquera
pas, en dépit de sa nature lubrifiante, de faire grincer les dents des
pétroliers...
Lionel LAPARADE.
Anticipant sur la décision
de la direction nationale des hydrocarbures, Alain Juste créera tout
prochainement son entreprise de production d'huile végétale brute. Génératrice d'emplois, elle mettra aussi à
contribution là jachère lot-et-garonnaise sur laquelle devraient pousser colza
et tournesol, nécessaires à la fabrication de l'HBV.
Alain Juste envisage, à
moyen terme, de produire quelque 500.000 litres d'huile par an, issus de 1.500
tonnes de végétaux cultivés sur les 600 ha de jachère du département. C'est là, d'ailleurs, un autre avantage, non
négligeable de ce carburant peu onéreux et peu polluant « Produire sur
place, c'est contribuer à l'économie locale -et c'est encore se libérer de
grands groupes industriels. Tous les départements pourraient se doter de
pareilles structures et produire, eux-mêmes, plus de 15 % de l'énergie
(chauffage et automobiles) qu'ils consomment. Les agriculteurs locaux ont, de
leur côté, tout à gagner en collaborant à notre projet. S'agissant du tournesol, la graine est
utilisée pour la fabrication de l'huile, et les tourteaux pour l'alimentation
du bétail », devait conclure Alain Juste, en annonçant au qu'il allait rencontrer bientôt tes grandes surfaces pour négocier, le
cas échéant, la distribution de l'HBV dans leurs stations-service. L. L.