EXTRAIT DES
MINUTES DU SECRÉTARIAT GREFFE
de la COUR D'APPEL
d’AGEN 47
1
A.C.
DOSSIER
N°02/00017‑C
ARRÊT
DU 25 NOVEMBRE 2002 N°:
382/02
ARRÊT
DU 25 NOVEMBRE 2002
Prononcé
publiquement le vingt cinq novembre deux mille deux, par la Chambre des Appels
Correctionnels,
Sur
appel d'un jugement du Tribunal de Police d'AGEN en date du 18 OCTOBRE 2001
BEDOURET
Alain, né le 20 Avril 1953 à AGEN, de nationalité française,
co-gérant - jamais condamné -demeurant 2, avenue du Maréchal Bugeaud - 47000
AGEN
prévenu, appelant, comparant, assisté de Maître BOULANGER
Gérard, avocat au barreau de BORDEAUX,
JUSTE
COMPANE Alain Luc, né le 24 Octobre 1949 à NANTERRE, de nationalité
française, co-gérant - jamais condamné –
demeurant Lieu dit "La Tuquette"
- 47480 PONT DU CASSE
prévenu, appelant, comparant, assisté de Maître BOULANGER
Gérard, avocat au barreau de BORDEAUX,
2
LA SARL
VALENERGOL "La Tuquette"
47480 - PONT DU CASSE
solidairement
responsable
appelante,
représentée par Me BOULANGER Avocat
LE MINISTÈRE PUBLIC
appelant
DIRECTION GENERALE DES DOUANES ET DROITS
INDIRECTS, 23 bis, rue de l'Université -
75007 PARIS
Partie
jointe, appelante, représentée par Mme DAAS Inspecteur des
Douanes
COMPOSITION
DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
PRESIDENTE:
Nicole ROGER
CONSEILLERS: Philippe LOUISET
Arthur ROS
lors du prononcé de l'arrêt :
PRESIDENTE:
Nicole ROGER
CONSEILLERS: Philippe LOUISET
Georges BASTIER
GREFFIERE présente
lors des débats et lors du prononcé de l'arrêt:
Madame IZARD.
MINISTÈRE PUBLIC :
représenté aux débats et au prononcé de l'arrêt
par
Monsieur DAGUES Avocat Général.
3
Le
Tribunal de Police dAGEN, par jugement en date du 18
Octobre 2001, a déclaré
BEDOURET
Alain
coupable de
MANOEUVRE TENDANT A UNE EXONERATION INDUE DE TAXE SUR LES PRODUITS PETROLIERS,
courant 1997, à PONT DU CASSE (47), infraction prévue par l'article 411 § 1, §2
G) du Code des douanes et réprimée par les articles 411 §1, 437 AL. 1 du Code
des douanes
JUSTE
COMPANE Alain Luc
coupable de
MANOEUVRE TENDANT A UNE EXONERATION INDUE DE TAXE SUR LES PRODUITS PETROLIERS,
courant 1997, à PONT DU CASSE (47), infraction prévue par l'article 411 § 1, §2
G) du Code des douanes et réprimée par les articles 411 §1, 437 AL. 1 du Code
des douanes
Et par
application de ces articles, a condamné solidairement BEDOURET
Alain
JUSTE COMPANE Alain et la SARL VALENERGOL à payer à la DIRECTION DES DOUANES une amende de
16.418,33 Frs (2.502,96 Euros) et à la somme de 16.418,33 Frs (2.502,96 Euros)
au titre des taxes éludées
LES
APPELS
Appel a
été interjeté par
Monsieur
BEDOURET Alain, le 19 Octobre 2001
S.A.R.L VALENERGOL, le 19 Octobre 2001
Monsieur
JUSTE COMPANE Alain, le 19 Octobre 2001
M. le
Procureur de la République, le 23 Octobre 2001 contre Monsieur JUSTE
COMPANE
Alain, Monsieur BEDOURET Alain, S.A.R.L VALENERGOL
DIRECTION
GENERALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS, le 29 Octobre 2001
Sur
citation à comparaître, l'affaire a été appelée à l'audience du 23 Septembre
2002,
4
A
l'audience publique du 23 Septembre 2002, la Présidente a constaté l'identité
des prévenus.
Monsieur
ROS Conseiller a fait le rapport oral de l'affaire ;
Me
BOULANGER Avocat a indiqué ne soulever in limine litis aucune exception de procédure;
BEDOURET Alain et JUSTE COMPANE Alain Luc ont été interrogés. Ils ont indiqué à la Cour les motifs de
leurs appels ;
Mme
DAAS, Inspecteur des Douanes, a été entendue ;
Le
Ministère Public a été entendu en ses réquisitions ;
Maître
BOULANGER, Avocat a été entendu pour les prévenus ;
BEDOURET
Alain et JUSTE COMPANE Alain Luc ont eu la parole en dernier.
Le
Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 14 OCTOBRE 2002.
A
l’Audience publique du 14 octobre 2002, le Président a dit que l'arrêt serait
prorogé au 25 novembre 2002.
Et ce
jour, la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu en
présence du Ministère Public et du Greffier, l'arrêt dont la teneur suit,
rédigé par Monsieur ROS Conseiller et lu par Nicole ROGER Présidente.
- ARRET -
La Société VALENERGOL représentée par Messieurs JUSTE COMPANE et BEDOURET
co-gérants, a pour objet la valorisation énergétique des produits oléagineux.
Le 26 février 1998 des agents du Service des Douanes se présentaient à
cette Société et recueillaient les déclarations de Monsieur JUSTE qui indiquait
que la Société fabriquait de l'huile végétale brute utilisable comme carburant
soit en mélange soit en substitution totale de produits pétroliers la demande
d'autorisation ayant été présentée auprès de l'administration.
5
Par
lettre du 2 mars 1998 Alain BEDOURET
indiquait que la Société VALENERGOL
avait au cours de l'année 1998 produit 10.000 litres
d'huile végétale.
L'article
265 ter du Code des Douanes dispose que:
"1.
Sont interdites l'utilisation à la carburation, la vente ou la mise en vente
pour la carburation des produits dont l'utilisation et la vente pour cet usage
n'ont pas été spécialement autorisés par des arrêtés du ministre du budget et
du ministre de l'industrie;
2. Sans préjudice des interdictions ou pénalités qui pourraient résulter d'autres dispositions législatives, les produits utilisés ou destinés à être utilisés ou en violation des prescriptions du 1 ci-dessus sont passibles des taxes applicables au supercarburant plombé".
Or, l'enquête diligentée par les agents des Douanes permettait d'établir que la Société VALENERGOL ne bénéficiait d'aucune autorisation administrative de commercialisation d'huile végétale comme bio carburant.
Dans ce contexte les agents des Douanes par
procès-verbal du 27 mai 1998 notifiaient à Alain JUSTE en sa qualité de
représentant de la Société VALENERGOL l'infraction constituée par une manoeuvre
ayant pour but ou pour résultat de faire bénéficier indûment son auteur d'une
exonération, d'un dégrèvement ou d'une taxe réduite prévus en ce qui concerne
les produits pétrôliers pour un montant total des
taxes éludées de 49.255 F, les acheteurs interrogés Messieurs HARSICK et PERE
ayant précisé avoir utilisé l'huile en mélange à hauteur de 30 % avec du
gas-oil comme carburant dans les véhicules de leur exploitation.
Entendu le 29 septembre 1998, Alain BEDOURET confirmait ces faits et
précisait que l'huile produite par la Société VALENERGOL avait été produite à
des fins de carburation de véhicules, vendue et utilisée par ses soins et ceux
de Alain JUSTE sur leur véhicule à titre expérimental.
Alain BEDOURET faisait par ailleurs parvenir à l'Administration des Douanes
un ensemble de documents attestant des démarches effectuées au nom de la
Société en vue de la prise d'un arrêté ministériel élargissant le régime
d'exonération de Taxe Intérieure des Produits Pétroliers dont bénéficient
certains bio-carburants à l'huile végétale brute.
6
Exerçant
l'action fiscale, le Directeur Général des Douanes et Droits indirects a ainsi
fait citer par actes du 14 février 2001:
‑ la SARL VALENERGOL, en qualité de solidairement responsable, pour avoir commis une manoeuvre ayant pour but ou pour résultat de faire bénéficier son auteur d'une exonération, d'un dégrèvement ou d'une taxe réduite prévus en ce qui concerne les produits pétroliers, s'agissant de l'utilisation à la carburation et de la vente à cet effet, sans autorisation, de 10.000 litres d'huile de tournesol d'une valeur de 35.000 F, ayant éludé 49.255,00 F de taxes,
‑
Alain JUSTE et Alain BEDOURET, en qualité de pénalement responsables, comme
représentants légaux de la SARL VALENERGOL
L'administration affirmait que la Taxe inférieure sur les Produits
Pétroliers (TIPP) était due sur tout produit destiné à être utilisé comme
carburant ; que cette extension résultait de l'article 265 ter du Code des
Douanes, précité, lequel est en parfaite conformité avec la directive
européenne n°92/81 du 19 octobre 1992 ; qu'il résultait de cette législation
que le critère d'application de la TIPP n'était pas la nature du produit, mais
sa destination de carburant ;
Elle précisait que le carburant proposé par la Société VALENERGOL ne
figurait pas au moment des faits sur la liste fixée par l'arrêté du 22 décembre
1978, modifié en 1991 et ne bénéficiait d'ailleurs, d'aucune dérogation ;
Elle soutenait également que Messieurs JUSTE et BEDOURET avaient engagé
leur responsabilité pénale en tant qu'organes de la SARL VALENERGOL; qu'ils
avaient agi en sachant que, même à titre expérimental, leur activité était
soumise à une autorisation dont ils ne disposaient pas ; qu'ils avaient utilisé
personnellement le carburant non vendu ; que la SARL VALENERGOL devait être
déclarée solidaire de ses dirigeants en vertu de l'article 407 du Code des
Douanes;
Il était demandé au Tribunal de déclarer Monsieur JUSTE et BEDOURET coupables
de ces faits, la Société VALENERGOL solidairement responsable et de les
condamner solidairement à payer à l'Administration des Douanes :
‑
une amende de 49.255 F en vertu de l'article 411 du Code des Douanes;
‑
les taxes éludées, d'un montant de 49.255 F, en vertu
de l'article 377 bis du Code des Douanes.
7
Les prévenus sollicitaient du Tribunal qu'il déclare nulle la procédure
affectée d'irrégularités formelles, au fond de juger que l'huile de Tournesol
n'est pas un produit pétrolier et par voie de conséquence qu'il les relaxe des
fins de la poursuite.
Par jugement du 18 octobre 2001 le Tribunal de Police d'AGEN a notamment:
‑
déclaré Monsieur Alain JUSTE et Monsieur Alain BEDOURET coupables et les a
condamnés solidairement avec la SARL VALENERGOL à payer à l'administration des
DOUANES :
‑
une amende de 16.418,33 F,
‑
la somme de 16.418,33 F au titre des taxes éludées,
retenant toutefois des circonstances atténuantes en leur
faveur.
Dans des conditions de régularité formelle et de délais non contestées
appel de cette décision a été relevé par l'Administration des Douanes, la
Société VALENERGOL, Messieurs JUSTE et BEDOURET ainsi que par le Ministère
Public.
Dans ses écritures, l'Administration des Douanes fait valoir que l'admission
des prévenus au bénéfice de circonstances atténuantes si elle autorise le juge
à réduire le montant des amendes fiscales et des sommes tenant lieu de
confiscation au 1/3 de leur montant minimal ne lui permet pas de diminuer le
montant des taxes éludées, les articles 377 bis et 369 § 4 du code des Douanes
s'y opposant ;
Elle demande à la Cour de
‑
confirmer le jugement rendu le 18 octobre 2001 par le Tribunal de Police d'AGEN
en ce qu'il a déclaré Messieurs JUSTE et BEDOURET coupables des faits qui leur
sont reprochés et en ce qu'il les a condamnés solidairement avec la Société
VALENERGOL à payer à l'Administration des Douanes une amende de 2.502,96euros
(16.418,33 F) au titre de l'article 411 du Code des Douanes.
Mais de
l'infirmer en ce qu'il a condamné Messieurs JUSTE et BEDOURET solidairement
avec la Société VALENERGOL à payer à l'Administration des Douanes une somme de
2.502,96 euros au titre des taxes éludées alors que le montant réellement éludé
s'élève à 7.508,88 euros.
8
‑
de condamner Messieurs JUSTE et BEDOURET solidairement
avec la Société VALENERGOL à payer à l'Administration des Douanes :
‑ les taxes éludées d'une montant de 7.508,88 euros (49.255 F) (article 377 bis du Code des douanes)
Devant la Cour les prévenus faisant valoir que la législation européenne ne prévoit que la fiscalité des huiles minérales en déduisent que les huiles végétales ne sauraient être passibles d'une imposition ne les concernent pas; de même ils soutiennent que n'entrant pas dans la catégorie des produits pétroliers l'huile de tournesol ne peut-être assujettie à la Taxe intérieure des Produits Pétroliers ; ils poursuivent leur relaxe, ;
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu qu'à l'audience les prévenus renoncent aux exceptions de nullités contenues dans leurs conclusions écrites régulièrement déposées; qu'il convient de le constater ;
Attendu
qu'en l'absence de dispositions communautaires spécifiques les Etats, membres
de la Communauté Européenne disposent du pouvoir souverain de légiférer dans
leur domaine de compétence propre ;
Qu'ainsi
si les Etats membres sont vivement encouragés par les résolutions européennes ( résolution du Conseil du 8/06/98, proposition de directive
du Parlement Européen et du Conseil200l/O265 ) à promouvoir une utilisation
plus généralisée des sources d'énergie renouvelables, ce secteur n'est pas
encore régi par des directives européennes à valeur supranationale ;
Attendu
que la Cour est saisie par des citations qui visent expressément l'article
265ter du code des douanes comme l'un des éléments légaux de la poursuite ;
Que les
prévenus n'ont nullement soulevé la nullité des actes de poursuite;
Attendu
que l'article précité interdit l'utilisation à la carburation et la vente à cet
effet des produits sauf autorisation spéciale administrative ;
Que
conçu en termes généraux ce texte dont il n'est pas démontré comme soutenu
qu'il ne trouve plus application sur le territoire national au regard de la
législation européenne n'opère aucune distinction entre les produits utilisés pour
la carburation et notamment leur origine minérale ou végétale ;
9
Attendu que les nombreuses démarches entreprises par les prévenus auprès de diverses personnalités politiques (messieurs VEYRET, HASCOET, BAUDIS ) aux fins de faire bénéficier les huiles végétales destinées à la carburation des mesures d' exonération fiscale prévues pour les huiles minérales, concrétisent de manière évidente leur connaissance que leur produit fabriqué en l'usine VALENERGOL à des fins de carburation et utilisé et vendu à cet effet était passible de la Taxe Intérieure des Produits Pétroliers ;
Qu'il
résulte de la procédure et des débats que bien que n'ignorant pas les
prescriptions de l'article 265 ter leur faisant obligation, avant toute
utilisation ou vente de leur huile végétale à des fins de carburation,
d'obtenir l'autorisation administrative préalable, les prévenus ont sciemment
utilisés eux-mêmes et mis sur le marché (dépositions de messieurs MARSICK et
PERE étayées par les factures établies par la Sté VALENERGOL) au titre de
carburant 10 000 litres d'huile de tournesol, commettant de la sorte
l'infraction qui leur est reprochée ;
Attendu que si en sa qualité de propriétaire des marchandises de fraude, la Société VALENERGOL a engagé sa responsabilité pénale tel est également le cas de messieurs JUSTE et BEDOURET ès qualités de représentants de cette personne morale ; qu'il y a donc lieu à leur condamnation solidaire avec ladite personne morale aux pénalités pécuniaires, taxes éludées et dépens ;
Attendu
qu'au regard du contexte de la commission des faits il convient de faire
bénéficier les prévenus de circonstances atténuantes ; qu'ainsi et par
application de l'article 369 § 1 c et d du code des douanes c'est à bon droit que
les premiers juges ont réduit le montant des amendes fiscales et des sommes
tenant lieu de confiscation au tiers de leur montant minimal soit 2 502,96 euros ;
Mais
attendu qu'en application des articles 369 §4et 377 bis du code précité cette
réduction ne saurait concerner les droits et taxes éludés ; que c'est donc à
tort que le tribunal a réduit lesdites taxes ;
PAR CES MOTIFS
La
Cour,
Après en avoir délibéré conformément à la loi et par arrêt contradictoire,
En la
forme, déclare les appels recevables,
10
Constate
que les prévenus ont renoncé aux exceptions de nullité soulevées dans leurs
écritures ;
leur en
donne acte ;
Au
fond,
Réforme la décision déférée ayant condamné messieurs JUSTE et BEDOURET ès qualités solidairement avec la SARL VALENERGOL à payer à l'administration des douanes une amende de 2502,96 euros au titre des taxes éludées,
Statuant à nouveau condamne messieurs JUSTE et BEDOURET ès qualités solidairement avec la SARL VALENERGOL à payer à l'administration des douanes une amende de 7 508,88 euros au titre des taxes éludées,
Confirme
pour le surplus le jugement dont appel.
Le tout
en application des articles susvisés, 512 et suivants du code de procédure
pénale.
Ainsi fait et jugé les jour,
mois et an susdits.
LA GREFFIERE, LA
PRÉSIDENTE,
G. IZARD. N.
ROGER