Attendus des douanes : procès VALENERGOL du 18 septembre 2001 Agen 47

 

1 - Les FAITS:

 

ATTENDU que la Société VALENERGOL SARL a pour objet la valorisation énergétique des produits oléagineux (tournesol).

 

ATTENDU que l'enquête des agents des Douanes effectuée au sein de cette société a permis d'établir qu'elle commercialisait pour la carburation de l'huile de tournesol pure, utilisable soit en mélange, soit en substitution totale à du gasoil.

 

Que la société reconnaît avoir fabriqué en 1997, 10 000 litres d'huile végétale brute.

 

Que les acheteurs interrogés ont précisé avoir utilisé l'huile, en mélange, à hauteur de 30% avec du gasoil, comme carburant dans les véhicules de leur exploitation.

 

ATTENDU que l'enquête a permis d'établir que la Société VALENERGOL ne disposait d'aucune autorisation administrative (DGDDI, Direction Générale des Douanes et Droits Indirects et DHYCA, Direction des Hydrocarbures) de commercialisation d'huile végétale comme bio carburant.

 

ATTENDU pourtant que l'utilisation à titre expérimental d'un carburant composé d'un mélange de gazole et d'huile de tournesol telle que pratiquée par VALENERGOL nécessitait la délivrance d'une autorisation à la Direction des Hydrocarbures.

 

Qu'en outre du point de vue fiscal, cette expérience ne peut pas bénéficier de l'exonération partielle de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) telle que prévue par l'article 25 de la Loi de Finance rectificative pour 1997 qui ne s'applique qu'aux esters méthyliques d'huiles végétales et non pas aux huiles.

 

ATTENDU en conséquence que l'utilisation à la carburation et à la vente à cet effet, sans autorisation, de 10 000 litres d'huile de tournesol d'une valeur de 35 000 F, constitue une manœuvre ayant pour but ou pour résultat de faire bénéficier son auteur d'une exonération, d'un dégrèvement ou d'une taxe réduite prévus en ce qui concerne les produits pétroliers.

 

Que cette contravention douanière a permis d'éluder 49 255 F de TIPP et autres taxes concernant les produits pétroliers et qu'elle est imputable à la Société VALENERGOL ainsi qu'à ses dirigeants, MM JUSTE et BEDOURET.

 

Il - Le DROIT:

 

ATTENDU qu'aux termes de l'article 265 Ter du Code des Douanes:

"1. Sont interdites l'utilisation à la carburation, la vente où la mise en vente pour la carburation des produits dont l'utilisation et la vente pour cet usage n'ont pas été spécialement autorisés par des arrêtés du Ministre du Budget et du Ministre de l'industrie,

 2. Sans préjudice des interdictions ou pénalités qui pourraient résulter d'autres dispositions législatives, les produits utilisés ou destinés à être utilisés ou en violation des prescriptions du 1 ci-dessus sont passibles des taxes applicables au supercarburant plombé".

 

ATTENDU ainsi que pour des raisons tenant à la sécurité des usagers et à la préservation de l'environnement, l'utilisation d'un carburant doit être autorisée conformément aux dispositions de l'article 265 Ter du Code des Douanes et de son arrêté d'application à savoir l'arrêté du 22 décembre 1978 modifié.

 

ATTENDU que le mélange composé de gazole et d'huile de tournesol utilisé par la Société VALENERGOL ne figure pas parmi la liste fixée par cet arrêté.

 

ATTENDU que la TIPP est due sur tout produit destiné à être utilisé comme carburant.

 

ATTENDU qu'en vertu de la directive 92/81 du 19 octobre 1992 concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les huiles minérales "tout produit destiné à être utilisé, mis en vente ou utilisé comme carburant ou comme additif ou en vue d'accroître le volume final des carburants est taxé comme un carburant." (article 2.3).

 

Qu'appliquant ce principe d'harmonisation fiscale communautaire, la France a adopté la règle selon laquelle "tout produit destiné à être utilisé, mis en vente ou utilisé comme carburant pour moteur est assujetti à la taxe intérieure de consommation au taux applicable au carburant dans lequel il est incorporé ou auquel il se substitue." (article 265-3 du Code des Douanes).

 

Qu'au regard des réglementations communautaire et nationale, le critère sur la base duquel un produit autre qu'une huile minérale est soumis à la TIPP assise sur les carburants n'est donc pas constitué par la nature du produit mais uniquement par sa destination de carburant.

 

ATTENDU, par conséquent, qu'un tel produit est passible de la TIPP à compter du moment où il est destiné à être utilisé comme carburant, y compris lorsque] s'agit d'une huile d'origine végétale.

 

ATTENDU pour finir que la Société VALENERGOL n'a pas vocation à bénéficier du régime dérogatoire prévu sous certaines conditions par la Loi de Finances rectificative pour 1997.

 

ATTENDU, en effet, qu'en vue de contribuer au développement communautaire des biocarburants, la France a mis en place un régime fiscal permettant aux unités de production agréées aux fins de production de biocarburants de bénéficier d'une exonération de TIPP, dont le montant varie en fonction de la filière à laquelle elle est appliquée (dérivés de l'alcool éthylique d'origine agricole ou filière esters méthyliques d'huile végétale).

 

Qu'ainsi l'article 25 de la Loi n° 97-1230 du 29 décembre 1997 portant loi des finances  rectificatives pour 1997 dispose qu'à condition d'être "élaborés sous contrôle fiscal dans des

unités agréés en vue d'être utilisés comme carburant ou combustible", ces filières bénéficient d'une exonération de TIPP dont le montant est fixé annuellement.

 

Qu'à partir du moment où cette exonération s'analyse comme une dérogation au régime communautaire applicable aux accises, son bénéficiaire doit répondre à des conditions précises.

 

Que l'exonération de la TIPP au titre des biocarburants ne peut donc être accordée qu'à une installation agréée par le Ministre chargé du budget, à la suite d'une procédure d'appel à candidatures publiée au Journal Officiel des Communautés européennes et après avis d'une commission d'examen nationale.

 

Que par ailleurs, la nature de la production réalisée au titre des biocarburants doit consister en des esters d'huiles végétales et non des huiles végétales comme c'est le cas de la Société VALENERGOL.

 

ATTENDU que saisi en mars 1998 par M. Alain VEYRET, Député du LOT ET GARONNE, le secrétaire d'Etat au budget a rejeté la demande d'exonération de la SARL VALENERGOL dans la mesure où le carburant produit ne correspondait pas à un ester, produit couvert par l'article 25 de la Loi de Finance rectificative pour 1997 et par l'arrêté du 28 août 1997 pris pour son application, mais à une huile, non détaxable au terme de cette Loi.

 

ATTENDU que s'agissant des sanctions applicables, l'article 411 du Code des Douanes prévoit :

1 .   Est passible d'une amende comprise entre une et deux fois le montant des droits et taxes éludées ou compromis toute infraction aux dispositions des lois et règlements que l'administration des douanes est chargée d'appliquer lorsque cette irrégularité à pour but ou pour résultat d'éluder ou de compromettre le recouvrement d'un droit ou d'une taxe quelconque et qu'elle n'est pas spécialement réprimée par le présent code.

2.    Tombent, en particulier, sous le coup des dispositions du paragraphe précédent, les infractions ci-après quand elles se rapportent à des marchandises de la catégorie de celles qui sont passibles de droits ou taxes toute manœuvre ayant pour but ou pour résultat de faire bénéficier indûment son auteur ou un tiers d'une exonération, d'un dégrèvement ou d'une taxe réduite prévus en ce qui concerne les produits pétroliers.

 

 

111 - Les RESPONSABILITES:

 

ATTENDU que MM JUSTE et BEDOURET ont engagé leur responsabilité pénale en leur qualité de représentants légaux de la société précitée.

 

Qu'en effet, "les gérants des sociétés à responsabilité limitée sont les organes des personnes morales qu'ils représentent et qu'ils engagent et non les préposés de ces personnes morales." (Cassation Criminelle du 27 juin 1977).

 

ATTENDU en outre, que cette société a fabriqué et proposé à la vente un produit servant de carburant sans aucune autorisation des Ministères concernés.

 

Que MM JUSTE et BEDOURET sont des professionnels qui se sont sciemment rendus coupables de la contravention douanière qui leur est reprochée dans la mesure où ils savaient

que l'expérimentation qu'ils avaient mise en place était soumise à autorisation et que l'huile de tournesol qu'ils commercialisaient, était passible des taxes sur les produits pétroliers de part sa destination de carburant.

 

Que sur audition, ils ont par ailleurs confirmé que l'huile de tournesol avait été produite à des fins de carburation de véhicules et également utilisée sur leur véhicule à titre expérimental.

 

Qu'en application de l'article 407 du Code des Douanes, la Société VALENERGOL en sa qualité de propriétaire des marchandises litigieuses sera tenue solidairement des condamnations prononcées contre MM JUSTE et BEDOURET.

 

PAR CES MOTIFS

 

PLAISE AU TRIBUNAL

 

 

DECLARER MM JUSTE et BEDOURET coupables d'une manœuvre ayant pour but ou pour résultat de faire bénéficier indûment son auteur d'une exonération, d'un dégrèvement ou d'une taxe réduite prévus en ce qui concerne les produits pétroliers.

 

DECLARER la société VALENERGOL solidairement responsable.

 

LES CONDAMNER solidairement à payer à l'Administration des douanes:

 

une amende de 49 255 F (article 5411 du C. D.)

les taxes éludées d'un montant de 49 255 F (article 377 bis du C.D.)

LE TOUT.en application des textes susvisés.

SOUS TOUTES RESERVES.